Avant de commencer, sachez que l’histoire de Katherina Oksana Tchekova n’est pas un conte de fées, c’est même loin d’en être un et ça n’y ressemble sous aucun prétexte. En grandissant, une fois qu’elle eut compris l’importance de tout cela ainsi que les circonstances dans lesquelles des passants l’avaient découverts dans une petite rue de Samara aux premières heures de sa vie, Katherina s’était mise à imaginer toutes sortes de scénarios et tous n’étaient pas très jolis à entendre mais, elle ne trouvait rien d’autres qui auraient pu justifier de l’abandon d’un nourrisson en pleine rue. Elle ne sait pas qui sont ses parents biologiques pas plus qu’elle ne connait les circonstances de sa conception, qui sait, peut-être qu’elle est issue d’un viol, d’un inceste ou qu’elle est l’enfant illégitime d’un riche héritier avec l’une de ces droguées qui se prostituent. Contrairement à d'autres personnes, connaître ses origines véritables lui importait peu, elle ne s'en portait pas plus mal parce qu'au moins, elle était maîtresse de sa propre vie qu'elle pourrait façonnée à sa façon. Toute sa vie est un grand point d’interrogation, y compris son nom, qui, vous l’aurez compris, n’est qu’une identité de substitution afin de mieux s’intégrer à la société.

S’intégrer. Un mot qui a toujours fait partie intégrante de son vocabulaire tant et si bien que l’enfant que l’on avait vulgairement prénommé « Sixteen » dans cet orphelinat où les pupilles de l’état sans identité étaient « numérotés », n’avait aucun mal à se faire à un nouvel environnement. C’est durant les huit premières années de sa vie qu’elle fut ballottée de foyers en foyers où elle ne resta jamais longtemps, la première fois pour mauvais traitements qui l’on rendu associable au point que les fois suivantes, les motifs de renvoi étaient pour fugues ou rébellion. Cependant, les séances chez le psychologue de l’orphelinat prouvèrent que cette jeune fille était très intelligente pour son âge et apte à endosser n’importe quel rôle sans la moindre difficulté, jouant avec plusieurs facettes de sa personnalité avec une facilité déconcertante. On lui prêta rapidement le titre de « Caméléon » ce qui intéressa au plus haut point certaines organisations secrètes pour lesquelles ce genre d’enfant était une aubaine, avoir une taupe psychologue infiltrée dans chaque orphelinat leur permettait d’être au première loge d’un casting géant comptant de nombreux enfants mais, dont certains d’entre eux parvint à tirer leur épingle du jeu. Leur favorite, « Sixteen », avait le profil parfait, elle n’avait aucune attache, était indépendante, maligne, intelligente au point d’être classée dans la catégorie des enfants surdoués, s’intégrait facilement et possédait un visage d’ange, c’était parfait pour leurs petites affaires.

C’est ainsi qu’à l’âge de 8 ans, Sixteen fut adoptée par un prétendu couple de cette fameuse organisation et fut nommée Katherina Oksana Tchekova, née le 7 septembre 1988 –tout du moins, prétendue date de sa naissance- à Samara. Elle n’était pas la seule, il y en avait beaucoup d’autres, tous sélectionnés pour devenir les espions de demain. On leur enseignait tout un tas de choses en commençant par l’art de la simulation, du mensonge, du combat avec ou sans armes et de divers dialectes. Les relations d’amitié entre les autres enfants n’avaient pas vraiment leur place, bien entendu, on les autorisait à discuter de temps en temps mais, jamais rien de plus. Ils avaient leur mentor attitré pour ça et Vladimir, un homme de 35 ans, était fier d’avoir pour protégée une enfant aussi douée qu’elle. Pour Katherina, ce n’était pas un problème, elle avait toujours été une solitaire dans l’âme et se fichait pas mal des autres enfants qu’elle ne supportait pas pour la plupart, préférant de loin la présence des adultes –en particulier de son mentor auquel elle obéissait au doigt et à l’œil- ce que les dirigeants du projet ne faisaient qu’apprécier davantage chez la jeune fille. C’était sûr, Katherina ferait une espionne parfaite, si parfaite qu’ils la surnommaient déjà l’Etoile, un nom de code qui circulait entre eux pour éviter de blesser les autres enfants en parlant d’elle ouvertement. Parce qu’il fallait dire qu’elle était au centre des conversations, encore plus lorsque son corps se développa au cours de l’adolescence en faisant d’elle une belle jeune femme tout à fait charmante. Tellement charmante que son mentor commençait à la voir autrement qu’une simple protégée, se mettant à la désirer. Intuitive et observatrice, Katherina avait remarqué les changements chez Vladimir mais, préféra attendre pour montrer les griffes. Aussi étrange que cela pouvait paraître, elle, espionne entraînée comme un soldat hésitait à repousser son mentor, consciente qu’il avait été cette figure paternelle dont on l’avait privé. Ainsi, lorsque les choses tournèrent au vinaigre, Katherina perdit tous ses moyens et fut incapable de réagir.

FLASHBACK

Aujourd’hui était une journée particulière, les « soldats » avaient été avertis de l’arrivée imminente de nouvelles recrues ainsi que de nouveaux mentors pour combler les effectifs, il avait donc été demandé à ce que les « élèves » donnent le meilleur d’eux-mêmes durant cet entraînement si particulier parce que les nouveaux venus se tiendraient tous derrière cette grand baie vitrée depuis laquelle s’organisait les missions et qui permettaient aux « parents » de surveiller les « enfants prodiges ». L’égo de Katherina avait incité cette dernière à tout mettre en œuvre pour ne pas faillir à sa réputation tant et si bien qu’elle se brisa le poignet au cours d’une confrontation avec l’un des plus âgés, ce qui ne l’empêcha pas de le mettre au tapis et de récupérer tout le mérite qui lui revenait. Elle savait qu’il s’agissait là de son passeport pour une nouvelle mission, les bruits courraient que les dirigeants étaient sur un coup très important qui nécessiterait une présence constante d’un agent à l’extérieur, pour Katherina, il ne faisait aucun doute que ce serait elle qui serait choisie pour cette future mission.

VLADIMIR ♦ « Katherina ? Comment va ton poignet ? »

KATHERINA ♦ « Mieux que mon adversaire en tout cas. »

VLADIMIR ♦ « Bien joué, je t’accompagne à l’infirmerie. »

KATHERINA ♦ « J’ai 20 ans, ça fait 12 ans que je vis ici alors je n’ai pas besoin de guide touristique pour m’y rendre, tu sais ? »

VLADIMIR ♦ « Je te connais, Katherina. Tu serais capable de fausser compagnie à l’infirmière. »

Katherina poussa un soupir avant de rouler des yeux, affichant une légère grimace qui ressemblait vainement à un sourire. Ce qu’il pouvait être « pot de colle » celui-là ! C’était encore pire depuis quelques années et la jeune femme commençait à s’apercevoir de son changement de comportement lorsqu’il était au près d’elle, de ces petits gestes qui se voulaient attendrissants mais, qui, au final, la mettait mal à l’aise. Paranoïaque ? Pas autant que ça à vrai dire. Plus les jours passaient et plus c’était de pire en pire mais, Katherina se disait qu’au cas où les choses évolueraient, elle parviendrait à se défendre comme s’il ne s’agissait là d’un nouveau test comme un autre. Suspicieuse, la jeune espionne suivit tout de même son mentor jusqu’à l’infirmerie en tenant de sa main son pauvre poignet qui avait été martyrisé durant cette séance d’entraînement. A peine furent-ils entrer à l’intérieur que Vladimir verrouilla la porte à clés et se tourna vers sa protégée avec un regard qui en disait long sur ses intentions. Katherina fronça les sourcils et d’un geste, recula jusqu’à ce que le mur ne la stoppe empêchant d’aller plus loin.

KATHERINA ♦ « Vladimir, qu’est-ce que tu fais ? »

VLADIMIR ♦ « Ce que j’ai envie de faire depuis un moment déjà et je sais que tu le veux aussi… Ca se lit dans ton regard, n’ait pas l’air si effrayé, Katherina. » dit-il en chassant une mèche de cheveux du visage de la jeune femme sur lequel apparut rapidement une moue de dégoût.

Katherina repoussa Vladimir de sa main douloureuse mais, vif comme l’éclair, il la lui saisit avec une telle violence que la jeune femme ne put s’empêcher de lâcher un cri de douleur. Son mentor avait ainsi dévoilé sa véritable facette mais, il avait oublié que la caméra les filmaient depuis le début tout comme il ignorait totalement que les dirigeants avaient affichés les images de Katherina, le modèle dont il avait choisi d’évoquer le parcours aux nouvelles têtes de l’organisation. Cette scène fut exposée aux yeux de tous sur un écran géant mais, c’est ce qui permit aux gardes d’agir en conséquence avant que l’irréparable ne se produise. Katherina avait évité le viol de justesse et passa devant tous les psychologues qui l’étudièrent un à un et pour qui la réponse de la jeune femme était la même : elle ne souhaitait plus de mentor attitré.

FIN DU FLASHBACK

Cependant, les dirigeants ne l’entendirent pas de cette oreille et confia la belle aux bons soins d’un américain répondant au nom de Jensen Bazhaev et qui était, d’après eux, le meilleur élément, connu pour sa loyauté, son efficacité et le respect des règles mais, aussi l'une des quelques personnes à avoir vu en direct l'agression de Vladimir à l'égard de Katherina qui ne voulait pas de sa pitié. Il eut beaucoup de mal à l'apprivoiser, peu confiante après ce qu'il s'était passé avec son autre mentor et il mit près d’un an à obtenir son respect, au cours d’une mission pendant laquelle la jeune femme fut blessée, Jensen resta à ses côtés et veilla sur elle comme Vladimir ne l’avait jamais fait auparavant, elle venait de mettre les pieds dans un engrenage infernal : l’amour. Elle, Katherina Oksana Tchekova, espionne connue pour être la plus douée, la plus sauvage et la plus indépendante de toutes s’était éprise de son mentor et aussi curieux que cela puisse paraître, elle se mettait à comprendre la frustration que l’on pouvait ressentir pour un amour interdit. Bien qu’il soit plus âgé qu’elle, elle tenta tout de même de le séduire jusqu’à ce que son mentor ne cède, devenant ainsi son amant et l'homme de sa vie. Alors qu'elle était censée n'avoir besoin de personne voilà que la présence de Jensen lui était vitale, elle se sentait protégée et s'inquiétait toujours lorsqu'il n'était pas auprès de lui, il avait réussi à la rendre docile, à l'apprivoiser d'une telle manière qu'elle ne pouvait plus se passer de lui jusqu'à ce fameux soir où l'un des dirigeants vint lui rendre visite à son appartement...

Il venait lui annoncer le meurtre de Jensen, tué au cours de cette mission dont il lui avait parlé le matin même lorsqu'il avait quitté son lit. Katherina qui ne voulait pas montrer publiquement les sentiments véritables qu'elle avait pour son mentor répliqua froidement qu'elle ne souhaitait pas d'un troisième homme pour diriger sa vie, ce qui était vrai, elle voulait Jensen et personne d'autres. Ce n'est qu'une fois seule qu'elle laissa ses larmes couler, les premières de toute une vie. Katherina finit par dépérir, se donnant corps et âme dans les missions suicides avec une telle détermination qu'elle fut sermonnée à de nombreuses reprises pour son manque de prudence manifeste. Elle ignore qu'en fait, Jensen est toujours vivant mais, qu'il a juste été muté loin de Katherina qu'il n'est plus autorisé à revoir parce qu'ils ont compris que ces deux là étaient plus proches qu'ils ne le faisaient croire.